Fantaisie pour coin et recoin de rue, gourbi, cul de basse fosse, fond de marmite, casemate, théâtre d’opérations à couvert ou découvert et autres envers d’endroits bien connus. Où il est question de guerre (la Grande), de têtes (des grosses) et de rire (à fendre la gueule).
Scélérat est un spectacle puisant son imagination dans l’ombre portée de la guerre, en l’occurrence celle de 14-18. Communément baptisée « Grande Guerre » et saluée en majuscules.
Où il est question de savoir si on peut rire de la guerre. Rire tranché dans la barbe d’un soldat dont la guerre fera un poilu ? Ou croqué sous la pointe déchaînée d’un « humour saignant comme une coupure de presse » ? Quoi qu’il en soit de Scélérat, quand humour il y a, et quelle qu’en soit la couleur, il ne laisse pas de marbre.
Grinçant et grimaçant, à l’aune des caricatures que brandissaient, de toutes parts, revues et journaux d’époque. Sarcastique à la Grosz, croquant les gueules d’un monde pris d’ivresse. Humour naïf de millions d’hommes convaincus que, de l’ennemi, ils n’en feraient qu’une bouchée, et qu’ils seraient de retour pour Noël… Humour scélérat, ça va sans dire, d’un spectacle de grosses têtes figées dans la pâte à papier, comme à la foire, et de musiques éclatantes comme à la parade.
Dramaturgie des espaces et espaces de dramaturgie
Il s’agit de creuser le réel au-delà des clichés du réel, de l’absenter, de le trouer pour mieux en saisir la présence par l’absence, le visible par l’invisible, l’abstraire en quelque sorte, se dégager de l’explosion assourdissante de la preuve et de son enfouissement avec l’énergie d’un poilu sous les décombres, de la boue plein les yeux, et proclamer : « Voyez cette énergie, ce n’est pas vraiment le réel, mais c’en est le mouvement ! »
Trous, anfractuosités, percements, galeries, tranchées, cavées, là où la vie se faufile, se terre, s’abrite, se love, se réfugie… Espaces « scélérats », à l’écart des itinéraires familiers, des repères officiels, à l’abri des regards, de la règle, des bombes, des obus, du froid, du vol. Dans le hors du champ, de la norme ou de la loi, dans le « sans » des papiers, du domicile ou de la révolte.
